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Changer la production alimentaire à pas de mouches | Raphaël Smia | TEDxParis

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    (Applaudissements)
  • 0:08 - 0:12
    En 2050, nous serons
    10 milliards sur Terre.
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    10 milliards d'habitants
    qu'il faudra bien nourrir.
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    10 milliards à vivre
    sur les ressources d'une planète
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    qui n'est déjà pas capable de produire
    durablement pour les 7 milliards actuels.
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    Ou en tout cas, pas de la façon
    dont nous l'exploitons.
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    Pour vivre, on a besoin de nourriture,
    on est tous d'accord avec ça
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    et en particulier de protéines.
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    Les ressources sauvages étant limitées
    et parfois difficilement atteignables,
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    on pratique l'élevage :
    cochons, poulets, poissons.
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    Mais pour produire 1 kilo
    de poissons d'élevage,
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    il faut le nourrir avec 5 kilos
    de poissons sauvages.
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    Conséquence : les stocks
    de poissons s'effondrent.
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    Pareil avec le poulet,
    que l'on nourrit avec du soja.
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    Plus on consomme du poulet
    et plus on a besoin de soja.
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    Et pour cultiver d'avantage de soja,
    on déforeste, notamment l'Amazonie.
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    Ce sont des écosystèmes entiers
    que nous détruisons
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    dans le but de produire
    plus de nourriture.
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    Et paradoxalement,
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    nous ne consommons pas
    tout ce que nous produisons.
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    Un tiers de la nourriture
    que l'on produit
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    ne sera jamais consommée
    par l'être humain.
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    Un tiers.
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    Notre planète s'épuise
    à produire du déchet.
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    Alors, pourquoi je vous raconte tout ça ?
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    Mon frère s'est marié cet été.
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    Il m'a fait l'honneur
    de me choisir comme témoin.
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    Alors le jour du mariage, devant ses
    proches, devant Monsieur le Maire,
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    à la lecture de l'acte du mariage,
    on nomme les témoins et leur profession.
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    Raphaël Smia, éleveur de mouches.
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    Oui, je suis éleveur de mouches.
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    Alors plus précisément,
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    je fais de la valorisation
    de biodéchets par l'insecte,
  • 2:12 - 2:14
    dans le but de produire
    protéines et lipides
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    pour l'alimentation animale
    et la chimie verte.
  • 2:17 - 2:19
    OK, je vous ai perdus.
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    Concrètement, on récupère
    des bio-déchets.
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    La pomme abîmée du supermarché
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    ou les restes alimentaires
    d'un restaurant.
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    On récupère tout ça, on le broie,
    on le mélange,
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    on le place dans nos bio-réacteurs
    avec des larves d'insectes.
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    Nos larves adorent les déchets
    et les matières en décomposition,
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    chacun son truc.
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    Elles vont manger, grandir, grossir
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    et lorsqu'elles auront accumulé
    suffisamment de protéines et de graisses,
  • 2:45 - 2:48
    on les destine à l'alimentation animale.
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    Naturellement, un poulet ne mange pas
    du soja OGM cultivé en Amérique du Sud.
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    Non, il mange des insectes.
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    Pareil pour les poissons.
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    Pourtant, c'est le schéma
    que l'on nous propose actuellement.
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    On cultive des céréales que l'on donne
    à manger à nos animaux d'élevage,
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    on récupère tout ça,
    on fait de la nourriture,
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    on le mange ou on le jette.
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    L'élevage d'insectes
    va permettre de récupérer
  • 3:13 - 3:15
    les nutriments encore
    dans ces déchets
  • 3:15 - 3:17
    et de les réinsérer dans le
    cycle alimentaire humain.
  • 3:18 - 3:22
    D'un schéma linéaire, on va passer
    à une économie circulaire.
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    Alors,
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    qui est ce super héros du recyclage ?
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    Je vous présente, la Black Soldier Fly
    ou mouche soldat noir.
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    Comme quoi,
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    la France n'est pas un pays
    de mouches de race blanche.
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    (Rires)
    (Applaudissements)
  • 3:45 - 3:47
    Alors petit cours rapide sur les mouches !
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    Une mouche pond des œufs.
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    De ces œufs vont éclore une larve.
  • 3:53 - 3:55
    Quand il y en a une, ça va,
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    c'est quand il y en a plusieurs
    qu'il y a des problèmes !
  • 3:58 - 3:59
    Ces larves vont manger
  • 3:59 - 4:01
    et lorsqu'elles auront suffisamment mangé,
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    elles vont devenir une pupe.
  • 4:04 - 4:06
    La pupe, c'est le cocon de la mouche
    en quelque sorte.
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    Et de cette pupe,
    au bout de quelques semaines,
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    va sortir une nouvelle mouche.
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    Et cette mouche est
    un animal d'élevage idéal.
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    Tout d'abord, il est inoffensif.
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    Il ne pique pas, il ne mord pas,
    il ne transmet pas de maladie.
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    En fait, la mouche adulte
    ne se nourrit même pas.
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    Elle ne fait que boire
    et chercher à s'accoupler.
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    Un peu comme si vous passiez
    votre vie entière en boîte de nuit.
  • 4:35 - 4:37
    (Rires)
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    Et puisqu'elle ne se nourrit pas,
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    elle ne va pas passer de notre poubelle à
    notre assiette en transmettant des germes.
  • 4:45 - 4:46
    Et puis,
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    elle existe à l'état naturel en France.
  • 4:50 - 4:53
    On ne risque pas un désastre écologique
    comme avec la coccinelle chinoise.
  • 4:53 - 4:54
    Enfin et surtout,
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    la larve de cette mouche
    est détritivore.
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    Elle est capable
    de manger et de traiter
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    une grande variété de déchets.
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    Elle-même n'en produira aucun.
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    Même ses excréments peuvent être
    utilisés comme fertilisant.
  • 5:10 - 5:13
    Bon, vous l'avez compris,
    ma mouche est parfaite !
  • 5:13 - 5:16
    Il ne restait plus qu'à la domestiquer !
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    C'est ce que nous avons entrepris avec
    mon associé, Jean-François Kleinfinger.
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    Nous avons construit
    notre premier laboratoire
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    en Loire Atlantique, dans une étable.
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    Nous y avons construit
    une enceinte climatique.
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    Alors une enceinte climatique, c'est
    une chambre complètement hermétique
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    où on contrôle la température, l'humidité,
  • 5:37 - 5:39
    et tout ça, là dedans.
  • 5:40 - 5:42
    Je peux vous dire que pour moi
    qui avait du mal
  • 5:42 - 5:43
    à monter un meuble IKEA,
  • 5:43 - 5:45
    c'était déjà un beau challenge.
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    On reçoit nos premières larves,
  • 5:48 - 5:49
    on les nourrit
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    et on attend avec impatience
    la première mouche.
  • 5:53 - 5:54
    Et la voici !
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    Notre première mouche
    du laboratoire NextAlim.
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    Alors, je dois vous dire que ma famille,
    mes proches,
  • 5:59 - 6:02
    ils émettaient quelques doutes,
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    notamment ma grand-mère,
    qui me demandait
  • 6:04 - 6:06
    quand j'allais
    chercher un vrai métier.
  • 6:06 - 6:08
    Et je peux les comprendre.
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    Je faisais les poubelles
    des supermarchés.
  • 6:13 - 6:16
    Je passais mon temps à regarder
    et à attendre impatiemment
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    que des mouches copulent.
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    Et je plaçais des larves
    dans des situations particulières
  • 6:21 - 6:23
    pour voir comment elles allaient réagir.
  • 6:23 - 6:26
    Par exemple, la larve de ma mouche
    a une particularité.
  • 6:26 - 6:29
    Lorsqu'elles ont fini de manger,
    elles vont migrer
  • 6:29 - 6:32
    en dehors de leur substrat,
    de leur nourriture.
  • 6:32 - 6:35
    Ça a ses avantages et ses inconvénients.
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    Avantage, il n'y a pas besoin de trier
    les larves une à une pour les récupérer,
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    c'est plutôt bien.
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    L'inconvénient, c'est quand elles migrent
    et qu'on ne s'y attend pas.
  • 6:45 - 6:48
    C'est ce qui s'est passé
    avec notre première génération.
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    Nous leur avions construit des bacs
    avec des rampes
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    pour faciliter leur migration.
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    Les rampes avaient un angle exact
    de 45° avec le sol,
  • 6:56 - 6:57
    comme le disait la littérature.
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    Vous imaginez un peu
    notre tête, le lendemain,
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    lorsqu'on retrouve
    le laboratoire jonché de larves
  • 7:02 - 7:05
    qui avaient eu la bonne idée
    de passer par les parois verticales
  • 7:05 - 7:08
    plutôt que par nos rampes.
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    Mais bon, la colonie progresse.
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    On en vient même à vouloir optimiser,
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    notamment le nombre
    d'accouplements, de pontes,
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    Pour ça, on joue
    sur différents paramètres :
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    la lumière,
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    la température,
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    et un petit peu de musique.
  • 7:32 - 7:39
    ♪ Barry White -
    My first, My Last, My Everything ♪
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    Non sérieusement,
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    la musique fonctionne vraiment
    aussi avec les mouches !
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    (Rires)
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    Cette domestication, nous l'avons réussie
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    et fort de cette expérience,
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    nous avons pu faire une levée de fond
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    auprès de partenaires privés
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    mais aussi
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    de partenaires publics
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    qui ont soutenu le projet à hauteur
    de plusieurs millions d'euros.
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    Avec cet argent, nous avons pu
    construire un laboratoire un peu plus pro,
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    mener des expériences plus rigoureuses,
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    et surtout établir le process
    et dresser les plans
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    de la première usine
    d'entomoculture industrielle.
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    En 2017,
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    nous serons capables de traiter
    13 000 tonnes de biodéchets,
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    de produire 4 000 tonnes de larves par an.
  • 8:33 - 8:34
    Alors, 4 000 tonnes de larves,
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    c'est à peu près
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    vingt milliards de ça.
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    Et tout ça, avec une seule usine !
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    Mais ce n'est pas tout.
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    Des biodéchets,
    il y en a partout en France.
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    Nous allons nous placer au plus près
    des producteurs de biodéchets
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    pour pouvoir produire
    de la protéine locale.
  • 8:58 - 9:00
    Mais pas seulement de la protéine.
  • 9:00 - 9:02
    Avec une tonne de biodéchets,
  • 9:02 - 9:05
    nous sommes capables
    de faire aussi 300 kg de fertilisant.
  • 9:05 - 9:07
    75 litres
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    de biocarburant.
  • 9:10 - 9:11
    Le plein d'une voiture.
  • 9:11 - 9:12
    Dans 10 ans,
  • 9:12 - 9:14
    c'est 50%
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    des farines de poissons
    que nous serons capables de remplacer.
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    Alors,
  • 9:22 - 9:23
    l'élevage d'insectes
  • 9:23 - 9:25
    n'est pas la panacée
  • 9:25 - 9:27
    pour sauver la planète
    et stopper la fin dans le monde.
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    Mais pour une société
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    plus durable et plus saine,
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    chaque petit pas compte.
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    Fusse-t-il de mouche.
  • 9:36 - 9:40
    (Applaudissements)
Title:
Changer la production alimentaire à pas de mouches | Raphaël Smia | TEDxParis
Description:

Cette présentation a été faite lors d'un événement TEDx local, produit indépendamment des conférences TED.

Révolté par des méthodes d’élevage qui consomment énormément de ressources et provoque beaucoup de gaspillage, Raphaël a trouvé, avec son associé, une piste pour changer le système…

Après des études de mathématiques appliquées à Polytechnique, Raphaël Smia effectue un master en Environnement à Melbourne. A son retour en France, désireux d’avoir un impact positif sur la société et de contribuer à la mise en œuvre d’un monde plus durable, il fonde NextAlim avec Jean-François Kleinfinger. Cette startup de valorisation par l’entomoculture industrielle a pour ambition de créer une nouvelle filière répondant à deux problématiques majeures de notre époque : la raréfaction des protéines et le gaspillage alimentaire.

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Video Language:
French
Team:
closed TED
Project:
TEDxTalks
Duration:
09:44

French subtitles

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